mardi 29 mai 2012

Tigran – A prince came to Amphijazz

Le petit prince du piano est venu, en solo, ce samedi 26 mai nous offrir un concert intimiste à l’Amphijazz dans le cadre de jazz à Vienne. Quelle chance de l’écouter ici, même si les tables ont été remisées pour gagner de la place.

Baskets, chemise blanche par dessus le pantalon de toile, coupe de cheveux branchée, un jeune "normal" se présente à nous dans la lumière où l’attend son piano. Il fait l’effort de parler en français pour nous dire qu’il est heureux qu’on soit là car c’est important pour lui. Il enregistre son prochain album après son concert en quintet à Fort en Jazz à Francheville la semaine prochaine. Il va donc nous l’interpréter et espère qu’on va l’aimer, simplement.
Dès le premier morceau on plonge dans son univers romantique entre classique, folklore et jazz, une ballade douce comme une invitation au voyage, on est prêt. Le second nous rappelle que le piano est aussi un instrument à percussion, autour de deux accords plaqués de façon répétitive Tigran improvise. On retrouve à nouveau son toucher fragile et sa voix étonnamment aigue par instant sur le troisième, comme sur son dernier album. Les sonorités orientales sont toujours présentes mais plus fondues, quelques notes au détour d’un phrasé rappellent ses inspirations et origines comme un vieil accent qui ressort par instant.
M’est revenu alors en plein concert cette phrase de Nietzsche (cher à ce blog) qui dit que la musique est le langage des sentiments. Je trouve qu’elle fonctionne à merveille avec Tigran. Sa grande force est là, il n’est pas plus virtuose que d’autre grand pianiste, même à seulement 24 ans, mais ce langage là nous parle et nous transporte. Que voit-il lui-même lorsqu’il joue ? On aimerait lui demander. Il sourit sur une trille, lève les yeux au ciel, grimace et plonge son nez au ras des touches pour mieux sentir les parfums. Retour à A Fable pour la fin du concert, Longing puis un magistral Someday my prince will come, l’introduction est ludique, quelques notes semées au hasard comme des cailloux blancs avant l’arrivée du thème. Les dernières notes resteront inoubliables, Tigran plonge littéralement dans le clavier, les deux bras tendus vers le bord droit du piano et s’y noie, quelques notes remontent en surface indéfiniment. Un seul rappel avec le mélodieux The Spinners ,toute la salle est debout et le petit prince est reparti vers les étoiles qui l’attendent.


JC JazzBof

lundi 21 mai 2012

David PREZ et Romain PILON Group: Le Prez au Périscope

Le vendredi 18 mai au Périscope
And now who is the president ?
David Prez, bien sûr, avec un nom comme ça, nul besoin de surnom, Prez c'était justement le surnom de Lester Young fameux saxophoniste américain des années 50.
David Prez , Saxophoniste Ténor, lui aussi, et Romain Pilon, guitariste,  présentaient ce soir leur projet commun : leur groupe, et leur deux albums tout fraichement sortis : "NY3" pour Romain  Pilon et"Awakening" pour David Prez.
Réveillés, nous l'étions fort bien avec un tel son au saxophone,  chaud et plein, et une telle énergie déployée par David, rien qu'avec lui on était partis pour la nuit.
Il était accompagné de surcroit par une équipe de choc, outre Romain à la guitare, Yoni Zelnik était à la contre-basse c'est un compagnon de longue date des deux compères, efficace et rassurant.
A  la batterie Fred Pasqua, marseillais d'origine, nous à fait forte impression, toujours à fond dans son "trip", il a eu ce soir là quelques moments de gloire, des solos enthousiasmants, et des interventions fort à propos qui ont maintenu le tonus à l'ensemble.
Le répertoire était constitué essentiellement des compositions des deux leader tirées de leur deux derniers albums et de quelques reprises. Des morceaux énergiques comme "Maze Player" ou des ballades comme "Blue". J'ai retenu un morceau très enlevé "Garage tune", rythme simple, propice à la mise en valeur de tous les musiciens.
Ils sont tous les 4 basés à Paris, même si David Prez est d'origine Lyonnaise  (des proches étaient d'ailleurs venus l'écouter, même des très jeunes). Paris, comme ville  incontournable pour exercer sa passion et son métier de jazzman c'est toujours un peu irritant de le penser. Mais soit, nous avons alors encore de la besogne pour promouvoir le jazz en région.
Quelques limites, pour moi, à la prestation du jour: le manque d'audace dans les compositions, et de variations dans les sonorités, notamment le son de la guitare est resté uniforme, et ce n'est pas la virtuosité du musicien qui est en cause, c'est dommage car ce n'est pas les techniques non plus qui font défaut.

Le public est resté enthousiaste; au rappel le groupe nous a servi une magnifique ballade de Duke Ellington "try to look like you", une musique de nuit qui invitait au sommeil, nous qui devions aller au bout de la nuit. Alors quoi , bon alors on reviendra.
JaZZmarc
Sur jazz-rhone-alpes.com ce billet et les autres chroniques sur les concerts de la semaine.

jeudi 17 mai 2012

Stockholm : La ville Jazz-Polar


J'avais deux mots pour tout indice pouvant m'aider dans ma quête : "Jazz" et "Polar"


Lisbeth Salander s'affichait partout dans cette ville de Stockhom, inconnue pour moi,  comme autant de cailloux blancs pour me guider.

Le hasard, ...ou pas, me fait rencontrer un musicien français, "réfugié émotionnel" en Suède depuis 15 ans où il est bassiste et compose de la musique dans un genre  Funk/Pop/Jazz ( même si les étiquettes ne l'intéresse pas visiblement). Il constate que les musiciens en Suède sont soutenus et mieux considérés qu'en France, la Suède se souvient qu'Abba lui a rapporté beaucoup de devises et a bien compris où se trouve son intérêt. Cette situation est donc favorable à la créativité.

A l'opéra point de jazz, mais on peut rentrer sans contrainte pour assister à la répétition d'un Opéra: un piano une Diva et 4 autres chanteuses/danseuses: Scotchés on en redemanderait.

Attiré par le son d'un groupe de Rock, je rentre dans un établissement genre Bar géant avec Orchestre, le seul intérêt du groupe c'est la taille de la jupe de la chanteuse et sa façon de se trémousser. Ça canonne pas mal dans le coin la bière est faiblarde, mais les suédois ont d'autres munitions : l'Aquavit est un alcool à 40° aromatisé à l'aneth. Ici les jeunes s'enivrent en écoutant de la daube; bon ce n'est qu'un effet de la mondialisation quoi !

 OK , direction les club de jazz; au Fasching Jazz Club un des plus grand de la ville le trio Omer Klein  se produit mais dès 19 heures plus moyen de trouver une place assise, je file au Glen Miller club, qui se positionne plutôt en restaurant jazz, ce soir on n'y sert des moules marinières en écoutant un pianiste en solo, mais là aussi le 2eme set est à 21 heures : les soirées sont courtes, les suédois seraient ils si sages ?

Le lendemain je décide de suivre la piste de Lisbeth Salander personnage inquiétant du polar phénomène "Millénium" de Stieg Larsson en allant au Melquist Kaffebar, où l'auteur est censé avoir écrit une partie de son roman et où il situe quelques rencontres entre Lisbeth et Michael Blomhvist.
Le tour millénium y amène du monde deux fois par jour : Art et Business toujours
A peine entré la douce voix de Chet Baker m'envahit, le décor est simple, un mur entier cependant est constitué d'instrument de musique Jazz, c'est bon j'y suis, c'est ici que je dois comprendre.

 Comprendre pourquoi j'avais envie de venir à Stockholm,
pourquoi le  jazz et les polars scandinaves ont tant de succès
  • Pour le Jazz on peut citer Jan Garbarek, Tord Gustavsen, E.S.T, Lars Danielson ... et
  • Pour les polars nordiques :  Stieg Larsson, Åke Edwardson, Henning Mankell, Arnaldur Indridason, Lars Kepler...
pourquoi la mort de Esbjörn Svensson , la lumière du monde du jazz, m'a autant touché ?

Les artistes sont peut être mieux considérés et aidés, mais c'est, je crois, ce mélange d'une certaine quiétude et d'une violence qui couve, qui fait leur charme.
Les Vikings étaient réputés pour être un peuple des plus violents, et des épisodes plus récents dans les pays Nordiques illustrent aussi cette tendance : l'assassinat d'Olof Palme en 1986 par exemple, chef du gouvernement suédois assassiné dans la rue ou la tuerie en Norvège il y a quelques mois, en 2011.

Quiétude et inquiétude

Je repensais à ça dans l'avion du retour en écoutant"Leucocyte" l'album posthume  d'Esbjörn Svensson : En voilà une illustration éloquente du calme qui précède le tumulte et la mort. Et si on se remettait un peu d'Esbjörn Svensson  Trio.

"Why she couldn't come" 

JaZZmarc

lundi 14 mai 2012

Fattigfolket : La complexité du jazz scandinave à Lyon

Vendredi 11 mai au Périscope
Pour clôturer ma semaine scandinave qui avait commencé à Stockholm, l'affiche de ce vendredi soir au Périscope m'avait attiré: Fattigfolket quartet du jazz Norvégien et Suédois.

Fattigfolket, soit "les pauvres" en français, propose une musique riche (sic) et complexe, mais d'un accès facile. Ils tournent depuis les années 2000 et ont publié trois albums. Ce soir pour une seule date en France ils présentent leur dernière création: "PARK". Chaque morceau de cet album porte le nom d'un parc qu'ils ont eu l'occasion de visiter au cours de leurs tournées, qui les ont inspirés, et où ils ont même composé.

 Nous avons déambulé donc avec eux dans les allées de ces morceaux qui respirent la quiétude des parcs.
 Le batteur Ole Morlen Sommer propose des rythmes improbables, disloqués, qui au bout d'un moment se révèlent parfaitement cohérents et renforcent la puissance de chaque morceau. Tous les musiciens du groupe ont cette obsession de la recherche de sons nouveaux .
 Hallvard Godal passe des clarinettes aux saxophones ténor, alto droit (rare) avec facilité. Grunnard Halle à la trompette arrive à nous sortir des nuances somptueuses et ainsi à créer des climats différents, sans peur des notes qui s'allongent à la Erik Truffaz. Putte Johander navigue lui entre basse et contrebasse avec beaucoup d'aisance et d'humour.
L'humour scandinave c'est par exemple, pendant le concert de nous faire une démonstration des dernières applications Iphone téléchargées : "Le métronome" et "La Setlist". Bientôt on ne saura plus faire de musique sans Iphone ? : Au secours Miles !

En sirotant une bonne bière, oui c'est autre chose que le breuvage insipide qui est servi dans les club suédois, la tête qui tourne légèrement on peut alors s'élever du plancher des vaches et décoller au grès des échanges des deux souffleurs qui semblent jouer quelques fois des partitions différentes qui s'entrecroisent et se rejoignent en progression hallucinogène jusqu'au moment d'extase culminant. Sans la bière ça doit marcher aussi :-)

 Décidément le jazz Scandinave est très créatif. Les illustres Jan Garbarek, Tord Gustavsen et compagnie sont bien accompagnés, le très regretté Esbjörn Svensson, (grand pianiste suédois leader du groupe E.S.T ), là où il est, doit être sûrement rassuré.

Sur jazz-rhone-alpes.com ce billet et les autres chroniques sur les concerts de la semaine. 
JaZZmarc

    

jeudi 10 mai 2012

Guillaume Perret du Métal en fusion

De mémoire d’enceintes de Jazz cela faisait longtemps qu’on n’avait pas ressenti de telles vibrations  dans les membranes. Le dernier album du saxophoniste Guillaume Perret et son Electric Epic est une bombe volcanique au sens littéral du terme. Du Métal en fusion !

Olivier Temime avait montré la voie en introduisant son sax en contrées Rockeuses et Erik Truffaz (à quelques coups de pédales wha wha d’Annecy, la ville de Guillaume Perret) démontré que les souffleurs connaissaient eux aussi les effets de l’électricité. L’amalgame est réussi.

 Bien épaulés par une basse ressortie des profondeurs du Magma (Philippe Bussonnet), les quatre énergumènes (avec Yoann Serra : batterie et Jim Grandcamp : guitare) nous embarquent dans une Odyssée mystérieuse et tonitruante du majestueux mont Kakoum (peut-être) jusqu’aux sombres Rivages des Morts, en passant par quelques haltes plus paisibles au bord du lac Chamo ou plus funky au palais de la belle Circé ? 
L’album s’achève sur un Massacra d’enfer (clin d’oeil au groupe de Death ?) , en tout cas on n’en revient pas indemne.
Le jazz français est quant à lui bien vivant et ça c’est tout de même une sacrée bonne nouvelle en ce moment.
JC JazzBof